Poème du jour : Frères humains
Par : Fatima Maaouia
Frères humains
Ventres rebondis de grains
Bouche pleine d’anathèmes
Pour Sparte et Athènes
Frères humains
Qui mangez des deux mains
La peau des miens
Grâce au FMI
Et Nations rassasiées Unies
De grâce!
N’ayez contre OXI
Et la Grèce
Dent dure ou cœur endurci
Poursuivant son idée et son chemin
Pour prendre en mains son destin
OXI
Étoile de bergers
A pris son bâton de pèlerin
Contre les pèle-reins
Amateurs d’os et de graisse
En masse
Pour que naisse
En dehors de leur nasse
Et charniers
En un mot
Ce qui est certain
En ces sales temps sans écot
C’est qu’avec sa gueule de métèque
Et de pâtre grec
OXI
A trouvé écho!
OXI
Mets les points
Sur l’Y:
Qui serre les poings
Se plie en quatre pour lui
Et dit OUI
A OXI
En gros, mes loulou
Voilà ce dont s’agit:
Ne pas être occis
Par les gros
Ne pas manger du pain rassis
Ne pas dire merci
À ceux qui aboient : Assis !
Compris?
Alors agis!
Merci!!
Analyse & Commentaire :
Enthousiasmée par le résultat du dernier référendum grec organisé le 5 du mois courant pour répondre aux propositions des institutions créancières internationales conditionnant l’aide à la Grèce à plus d’austérité, la poétesse accueille le nom « oxi » du peuple de ce pays comme l’attitude la plus appropriée contre l’hégémonie du capitalisme mondial sur l’économie des pays pauvres et ses visées cupides de réduire leurs peuples à l’esclavage. Et cette euphorie est d’autant plus intense que l’auteure voit dans ce « oxi » un modèle à imiter par son pays qui se débat dans une situation économique non moins catastrophique (Frères humains / Qui mangez des deux mains / La peau des miens / Grâce au FMI / Et Nations rassasiées Unies).
S’ajoute à cela – et il faut le dire – le fait que la partie de laquelle émane ce refus est le gouvernement grec lui-même qui est de tendance gauche c.à.d ; de la même sensibilité politique que l’auteure. Et là apparaît clairement son adhésion à la solution préconisée par la gauche tunisienne qui consiste au rééchelonnement du payement des dettes externes de l’état.
Néanmoins, ce texte ne tire pas nécessairement sa valeur de son contenu sémantique, vu que les opinions que la poétesse y exprime sont partagées par un bon nombre de ses concitoyens mais plutôt de son côté esthétique qui se distingue par le style réellement singulier de cette jongleuse de mots, lequel ne peut être qualifié que de « fatimaien », tellement ses traits sont atypiques et constants, étant présents dans tous ses poèmes sans exception à tel point qu’elle peut fort bien publier ses textes sans signature. Et le plus récurrent de ces traits est, sans doute, la frénésie qui secoue de bout en bout la chaîne parlée, la segmentant à la fois suivant l’état émotionnel de la poétesse (exaltation- exhortation – ironie (Nations rassasiées Unies -Étoile de bergers / A pris son bâton de pèlerin / Contre les pèle-reins / Amateurs d’os et de graisse) – et le rythme aussi bien externe ( rimes) qu’ interne ( répétitions (oxi » ) – parallélisme (Ne pas être occis par les gros / Ne pas manger du pain rassis / Ne pas dire merci…). Et le résultat est un discours éclaté bien dansant qui tient le lecteur en haleine du premier jusqu’au dernier vers. Un nouveau joyau Fatima ! Mes compliments !
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