Tout comme au soir d’un élégant rendez-vous,
j’ai déposé avec soin sur mon lit fait de satin,
ma tenue de liberté à l’envolée sizerin.
Brodée de mousseline noire, elle sied au plus près
de mon teint qui d’ici là, aura perdu le rosé de ses
pommettes en un sommeil opalescent.
Le calme règne dans cette pièce close à double tour.
Des effluves de jasmin qui, en brume s’évapore du bain,
font vaciller les flammes scintillantes des
candélabres de marbre, se jouant de mon macabre théâtre.
Assise sur le bord émaillé, je tends le bout de mes
doigts vernis de cassis, dans cette mousse soyeuse, où
mon attente crépite et éclate en larmes. Le désir me
fait osciller entre pudeur et charité de ma chair, pour
ce geste irréparable que je m’apprête à exécuter.
Une gorgée à mes lèvres frémissantes, d’un
chardonnay enivrant. Divin élixir aux milliards de billes
qui éclatent sous ma langue, emportant les quelques
pilules aux couleurs moroses, plongeant mon conscient
dans un parallèle aux teintes arc-en-ciel.
Un intimiste soliloque, où l’esprit rend les armes,
face à ce corps qui s’abandonne au repos céans. Dans
cette Tamise odorante parfumant l’instant, l’oubli
apaisant, se lira au sourire de mon visage, semblable à
l’éternelle noce.
Encore quelques gorgées alcoolisées et le corps
frissonnant je m’immerge dans ce liquide
réconfortant. Un capiteux bien-être qui me ramène à
mes premières heures, où une sécurisante vie,
semblait permise.
Je ferme les yeux, Chopin m’offre son air
nocturne, qui berceront mon âme jusque dans l’audelà.
Je me noie à ses notes, mon cœur suffocant
submerge et, de mes sanglots je nourris les eaux
fumantes. Un paradoxal sentiment, une dualité entre
crainte et délivrance, où je me sens divinement bien.
Le voilà le moment idéal, ce moment où la raison
déraisonne en un rêve buttoir, afin d’oser l’ultime voyage.
J’ouvre péniblement mes yeux et du regard,
je cherche l’étincelant rasoir à larmes,
posé là, sur le bord de ma Seine.
Une offrande d’acier tombé des cieux, pour
trancher dans le vif, la douleur qui loge en mon corps,
depuis trois décennies d’adversités suppliciées.
De mes poignets s’écoule enfin ma vérité, un mal
viscéral que je purge de mon âme,
pour y rejoindre le néant abyssal.
Mes petites affaires en ordre, de belles-lettres
d’excuses pour moins de remords, je quitte éthérée la
dureté de cette terre, vêtue de noir cendré, éparpillée
sur un point d’horizon en triste égoïste Chopiniste.
Les Noces Éternelles |
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